Le journal Le Monde vient d’achever sa série de longs articles sur le déclin et la chute de l’Empire romain, un sujet qui parvient même aujourd’hui à susciter des vives controverses. L’article qui m’a le plus frappé traitait des flux de réfugiés germaniques qui arrivaient aux frontières de l’Empire, fuyant l’invasion des Huns, dans le IVe siècle de notre ère.
D’abord, le sujet est intéressant en soi. Citant la “charité chrétienne”, l’empereur romain décide d’accueillir les milliers de réfugiés rangés sur la rive du Danube - un prétendu geste moral que les historiens voient plutôt comme motivé par la crise démographique que l’Empire subit à l’époque. Peu à peu, les nouveaux-venus germaniques sont intégrés dans la société romaine - en particulier dans l’armée romaine qui a besoin d’effectifs pour mener la guerre contre les perses à l’est.
Tels sont les détails factuels pertinents. Or, j’étais frappé par l’analyse de ces faits de l’historien allemand Alexander Demandt. Selon lui, cette vague de migration massive a fortement contribué à la chute de l’Empire. Il pointe notamment du doigt la tension entraînée par l’arrivée de Germains dans les postes de haut rang de l’armée, ce qui aurait provoquée des assassinats et des écrits xénophobes à leur encontre. En bref, Demandt fait valoir que ces événements ont conduit à ce que l’État romain perde le monopole de la violence.
Alors que je ne connais pas grand chose en histoire romaine, j’étais surpris et un peu réticent en lisant cette analyse - après tout, comment un simple manque d’intégration aurait pu faire tomber une des plus grandes puissances de l’histoire ? Mais la vraie surprise est arrivée quand j'ai lu que ce même historien allemand a publié cette analyse début 2016, en pleine crise migratoire européenne.
Ayant déjà soupçonné une motivation politique derrière l’argument de Demandt, j’étais tout de même choqué quand l’historien l’a même assumée dans un entretien avec un journal allemand. Ce dernier fait le lien d’une manière explicite entre les graves conséquences sur l’Empire romain d’avoir accueilli tellement de réfugiés, d’un côté, et la décision dite erronée du gouvernement d’Angela Merkel de ne pas fermer les frontières aux migrants fuyant le Moyen-Orient, de l’autre côté.
Cette situation m’a laissée un peu déboussolé. Voici un historien de renom qui exprime les sentiments sur des questions politiques contemporaines avec lesquels je ne suis pas du tout d’accord. Mais quelles devraient être les conséquences de cette mésentente politique sur ma lecture de l’analyse historique que fait Demandt ? Est-ce que le pessimisme - à mon avis excessif - qui characterise ses opinions politiques doit mettre en doute ses conclusions historique ? Le mieux serait d’avoir moi-même une connaissance de l’histoire romaine qui me permettrait de tirer mes propres conclusions. Mais à défaut d’une véritable enquête académique de ma part, je me sens un peu perdu.
Finalement, je salue les journalistes du Monde poir avoir rendu un tel débat et une telle période historique accessible pour un public non spécialiste !
(Amazing formal writing!!) some corrections:
Merci beaucoup pour les corrections Alice! "Un groupe nominal" ça veut dire que "l'article s'agissait de" est bon mais "l'article qui m'a frappé s'aggissait de" n'est pas bon?
Pas de problème ! Par « groupe nominal » je veux dire un groupe autour du nom - ce qui peut juste être un déterminant et un nom, comme « l’article ». En général, l’expression est « Il s’agit/s’agissait de … » et pas « … s’agissait de … » ; donc non, on ne peut pas dire « l’article s’agissait de ». Quand tu utilises la bonne forme, ça implique que le sujet de « Il s’agit de … » que tu précises dans cette phrase a déjà été mentionné dans la phrase précédente. Par exemple, avec ce que tu as écris plus haut, on pourrait avoir : « J’ai été frappé par un article en particulier. Il s’agissait d’un article sur … » :)
Merci encore Alice, c’est très clair et très utile!